19.7.07

FIONN REGAN ET DES MÈCHES FRISÉES DANS L'ÉVIER

Je déteste quand le Renaud-Bray découvre de la bonne musique avant moi – c’est en quelque part entre la honte et le déni, habituellement. On veut tellement toujours être trop trendy, trop avant-garde, trop pre-trendy, post-whatever, que des fois y’a que les moyens financiers pour nous retenir. Mais messemble qu’à toujours chercher la prochaine-prochaine-vague, on doit finir par surfer sur du flat. Évidemment, je dis pas qu’il faut écouter du fucking Dave Matthews Band pour le restant de ses jours, sous prétexte qu’il ne s’est jamais rien fait d’aussi bon depuis. Tant qu’à ça, remontons à Nirvana, aux Beatles, à fucking Beethoven. Non, la ligne est mince entre paresse intellectuelle et diète musicale parce que compte en banque pas plein.
Mais je dis n’importe quoi. Là, cette semaine, mon orgueil de mélomane a pris un autre coup – comme avec The Arcade Fire, quand même David Bowie se masturbait déjà à la voix de Win Butler avant que «Funeral» me passe par les oreilles. Et le coup s’appelle Fionn Regan, The End Of History. Je l’ai trouvé sur le rack des nouveautés du Renaud-Bray où Anne travaille – étonnamment, elle l’avait pris en note elle aussi, après l’avoir entendu jouer plus tôt dans la journée. Moi j’ai lu le sticker sur l’emballage et j’ai été intrigué : «Ireland’s answer to Bright Eyes.» Bon, OK. On s’entend qu’ils les choisissent les citations de critiques. Faut pas capoter, j’ai déjà lu sur la cover d’une revue pour hommes que Jack Johnson était «Hawaii’s answer to Elliott Smith.» Come on. Jack Johnson, depuis In Between Dreams en tout cas, c’est peut-être la version hawaïenne de Hootie & The Blowfish. Et de Ben Harper, à la grosse limite. Moi j’aurais écris «Hawaii’s answer to Ritalin.»
Et puis, le sticker promotionnel sur l’emballage du disque de Fionn Regan citait aussi une autre critique qui comparait l’artiste à un jeune Dylan, avec l’intensité de Nick Drake. Deuxième Bon, OK. Sans doute la comparaison la plus fréquente pour les jeunes singers-songwriters anglophones, depuis que Dylan n’est plus jeune. L’intensité de Nick Drake, elle s’applique apparemment à tout ce qui sort du UK, qui a une guitare acoustique et trois quatre métaphores dans ses paroles.
Mais, la curiosité a persisté, et deux jours plus tard, Anne l’a emprunté. Et, sans vouloir revenir sur les comparaisons, je dirai seulement que ça fait sûrement juste vendre des disques, mettre Bright Eyes, un jeune Dylan et Nick Drake comme pseudo-endosseurs d’un nouvel artiste. Très content de cette nouveauté qui m’a permis de reprendre contact avec mon côté artsy-folky.
D’ailleurs, j’écoutais Fionn Regan quand m’est venue une envie soudaine de me couper les cheveux. C’est pas que le gars chante à propos de coiffures, ou d’angoisse capillaire quelconque - «Split ends, baby / I got split ends since you left me » ahahahah –, il y a seulement le fait que j’étais dû pour une coupe et que, j’sais pas, ce genre de musique acoustique, intimiste, sensible, tranquille, homey, confortable, Josée DiStasio sans les bends de cordes quétaines et l’ambiance faux-flou trop claire; établit une atmosphère favorable aux activités intimes telles que la préparation d’un rôti, un changement de cordes de guitare ou se couper les cheveux.
Je voyais les petites mèches frisées tomber le long de mon t-shirt jusqu’au creux de l’évier, en écoutant «Hey Rabbit», «Black Water Child» et «Put a Penny in the Slot». L’image était don’ jolie, était don’ cinématographique. C’est dans des moments comme celui-là que j’en viens à me demander ce que les gens pouvaient bien aimer dans la musique avant l’invention du cinéma. Moi, je me surprend à faire des trames sonores instantanées pour tout ce que je vis.
C’est comme la musique quand on est amoureux. Je suis debout dans ma salle de bain, à grimacer devant le miroir, ciseaux en main, priant Robert Johnson – la réincarnation du Christ – pour que mon amoureuse ne soit pas trop déçue de mon look patenté. Dans notre salle de bain, dans notre appartement, notre maison; à écouter une musique qu’on aurait chacun choisi individuellement. Je me demande comment j’ai pu aimer la musique avant d’avoir été amoureux, puis déçu, puis amoureux, puis déçu, puis amoureux de nouveau, pour de vrai.

2 commentaires:

Anne a dit...

Si vous voulez savoir, c'était très joli les cheveux...

Alexie M a dit...

Ooooooooh...

Y'es-tu assez... ohhh.

On a le goût de les lui ébouriffer ou de lui pincer les joues.