26.1.10

Extrait


Sinon, l’usine ressemblait, en tout et pour tout, à une usine : des structures de métal toujours visibles, des moteurs et des mécanismes de tous genres, un plancher de béton, des airs bêtes, maussades, de la musique en hautes fréquences sortant de haut-parleurs en forme de cônes. Quelques employés affichaient une sorte d’enthousiasme démesuré, un débordement d’entrain qui semblait agacer même leurs responsables de quart. J’imagine que dans une usine où défilent tour à tour les carcasses d’animaux de toutes espèces, l’optimisme peut renfermer quelque chose de pathologique et de troublant. Il s’agit quand même de leur faune : ce sont les trippes d’un chevreuil du coin, les vaisseaux lymphatiques d’une vache de leur voisin, les veines de quelque vermine que leur propre chien a sans doute déjà aperçue qui se dévident dans la gouttière du convoyeur. Le véritable flux régional circule dans cette gouttière. D’ailleurs, j’étais étonné d’entendre chez Sanimal exactement le même poste de musique FM que chez McStetson Canada Inc. – et que dans la salle d’attente du centre local de l’emploi, maintenant que j’y pense. Ici, la candeur de la pop me donnait des frissons. Les quelques employés qui sifflotaient l’air de « Oops! I Did It Again » en triant les carcasses par catégories – non-équarrissable, partiellement équarrissable ou malaxable – ne pouvaient être que des psychopathes.

3 commentaires:

Anna a dit...

J'aime ça.

Anonyme a dit...

Sanimal!

William a dit...

Anna:
Merci beaucoup!

Bock:
Ouais, ben, je me suis inspiré de ça:

http://www.sanimax.com/

On s'entend que le jeu de mots et le mauvais nom de compagnie étaient imminents...