Bonne année, mon Dagne!

Goddamn right, it’s a beautiful day, huh-huh. Il répète le refrain de la chanson en prononçant le huh-huh différemment d'une fois à l'autre. Tantôt, il a l'accent français des chevaliers de Monty Python. Tantôt, il parle comme Boris ou Natasha dans Rocky & Bullwinkle. Un autre tantôt, il se transforme en Guy A. Lepage. Ils disent que le "bonheur" est contagieux, c'est faux. Ici, le "bonheur" rend perplexe par son hermétisme - on voit quelqu'un qui vit un moment extraordinaire, on reconnaît que c'est extraordinaire, on essaie du mieux qu'on le peut d'être empathique, on enchaîne les high-fives, on est foncièrement content pour lui, mais une espèce de cynisme inexplicable gâche l'expérience.

Il répète les bouts de refrain en remplaçant, une fois sur deux, it's a beautiful day par sont blasés, les casés. Huh-huh.

En gros:

C'est beau l'amour ("mais les bananes, ça bourre" ajouterait mon grand-père Messier) : nous le pensons tous et refusons de le dire trop souvent, pour la même raison qu'on ne passe pas son temps à raconter la première fois qu'on a fait l'amour, on est conscient de l'importance du moment, on est assez honnête pour reconnaître l'aspect tout à fait extraordinaire de l'événement, mais on refuse de s'étendre sur le sujet parce que ça deviendrait trop clinique ou psychanalytique. On se mettrait à n'y voir qu'une série de pénétrations.

Quand on parle trop de nos débuts amoureux, on se met à halluciner des coeurs partout. Et pour une mini-communauté soi-disant intellectuelle, il n'y a rien de plus anti-amoureux que ce discours sur l'amour comme venant de ce "coeur" qui n'est aucunement réaliste, qui est un logo, un "je t'aime" de Mickey Mouse. Par contre, en même temps, pour ce même groupe de gens, il n'y a rien de plus douloureusement cliché que de trouver le cliché cliché. Tout comme il n'y a rien de moins original que d'adhérer au premier cliché par simple opposition au cliché de deuxième degré.

Donc, avant de se perdre dans le méta-méta-proto-proto-post-post, rendons à l'amour ses lettres de noblesse. Y'a un ami qui vit de très beaux moments pour le nouvel an, et il s'étonne qu'il y a juste ses amis "en couple" qui ne reconnaissent pas l'aspect merveilleux de la chose. Grâce à ce bonhomme qui répète en boucle que c'est a beautiful day, faut avouer qu'on se repasse tous, nous aussi, nos propres tounes de débuts amoureux.